Des Technosols construits à partir de produits résiduaires urbains : services écosystémiques fournis et évolution

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Themes: biodiversité, bâtiment, éco-conception
Les villes ne cessent de se densifier au détriment des espaces de nature qui corrélativement se réduisent, tout comme les services écosystémiques qui leur sont associés. Face à ce constat, la végétalisation du bâti apparaît comme une alternative indispensable. Dans ce cadre, les toitures végétalisées font partie des outils d'aménagement des villes qui sont en pleine expansion. Ces toitures revêtent différentes formes, s'adaptant aux contraintes et enjeux urbains. Depuis quelques années, une nouvelle forme de toiture végétalisée a émergé : les toitures végétalisées productives (e.g. de biomasse alimentaire). Encore peu développée et mal connue, l'intérêt concernant cette forme de toiture ne cesse de croître. Leur conception, leur aménagement et surtout les services écosystémiques quelles peuvent rendre sont aujourd’hui encore mal connus et nécessitent d’être mieux appréhendés. Clé de voûte des toitures végétalisées, le sol en place influence directement et indirectement les services écosystémiques rendus par celles-ci. En dépit du rôle majeur de ces sols, peu d'études leur sont consacrés. Par ailleurs, des produits non renouvelables tels que la pouzzolane, l’argile expansée ou la tourbe sont aujourd’hui très majoritairement utilisés dans leur composition. Nous avons étudié des Technosols, c’est à dire des sols reconstitués, de toitures productives composés uniquement de produits issus de résidus du milieu urbain. Ce travail a eu une double ambition : (i) évaluer quantitativement les services écosystémiques rendus et (ii) comprendre les premières phases d’évolution des Technosols. Pour cela, trois dispositifs expérimentaux, installés sur la toiture « Bertrand Ney » de l’école AgroParisTech ont été utilisés. Il s’agit de bacs de cultures dans lesquels des sols sont construits, avec des agencements divers de cinq résidus urbains: un compost de déchet vert, du bois broyé, de la brique et de la tuile concassée, un résidu de champignonnière et un compost de biodéchet. Nous avons étudié l’effet des différents types de Technosols construits sur (i) les services écosystémiques rendus, (ii) la production alimentaire (quantitative et qualitative), (iii) la fertilité physico-chimique et (iv) leur évolution temporelle. Les Technosols construits sont fertiles et permettent une production alimentaire conséquente sur une à cinq années, caractérisée par de faibles teneurs en éléments traces métalliques équivalentes à celles de la moyenne des productions maraichères. L’évaluation quantitative de services écosystémiques (production alimentaire, recyclage de résidus urbain, rétention des eaux de pluies et qualité des eaux de percolations (C et N), a souligné le caractère multifonctionnel des systèmes étudiés et met en évidence un disservice, qui est une altération de la qualité des eaux de percolation par lixiviation du carbone, pouvant être liée à celle d’autres éléments. Une première phase de pédogénèse rapide et intense est observée, marquée par une forte biodégradation des matériaux et une forte lixiviation. Nos travaux ont mis en évidence l’existence d’un double compromis dans la conception d’un Technosol productif, entre (1) la biodégradation des matériaux (assurant la fourniture des nutriments minéraux aux plantes) et le maintien de la structure et porosité du matériau, donc de sa fertilité physique d’une part et entre (2) la fourniture d’élément nutritifs par biodégradation et la lixiviation, se traduisant par une perte de ces éléments et une altération de la qualité des eaux de percolation d’autre part. La connaissance des propriétés des matériaux utilisés et de ses liens avec les services écosystémiques attendus permet déjà de concevoir des toitures productives multifonctionnelles à partir de résidus urbains et de les gérer de manière durable.

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http://www.theses.fr/2017SACLA043